De la mobilisation à la défaite (1939-1940)
"Les Allemands ont enfoncé nos lignes partout dans le nord et l’est du pays et déferlent vers l’ouest. Nos supérieurs nous réunissent et nous expliquent notre tâche : empêcher le plus longtemps possible l’ennemi de prendre le port de Brest et permettre au gros de l’armée et aux navires de la flotte de quitter Brest. Le plan paraît bon. La réalité est tout autre.
Alors que je me trouve avec des compagnons derrière des barricades de fortune à Guipavas, nous avons des fusils et quelques mitrailleuses pour arrêter la division blindée que nous voyons surgir… Malheureusement, nous ne pouvons les arrêter très longtemps et sommes bientôt fait prisonniers".
Xavier Théven - Lesneven - Elève officier (19 juin 1940)
"Papa était chef mécanicien dans la marine. Le 23 août 1940, alors que les Allemands occupent depuis peu le pays, il doit effectuer une opération de dragage au large de Lorient sur le Montjoie. Son navire saute sur une mine sous-marine, entraînant par le fond tout l’équipage. Je suis née le 31 octobre, deux mois après sa mort. Mon papa, ça n’a toujours été pour moi qu’une photo et ces quelques objets. Son uniforme de sortie, sa carte d’entrée à l’arsenal. Mais aussi la dernière lettre qu’il a expédié à ma mère, où il lui dit qu’il est temps de me choisir un prénom, car la naissance approche. Et enfin le télégramme qu’elle a reçu pour lui annoncer la nouvelle".
Fille de Louis Thérène - Brest - Maître-principal mécanicien - Marine nationale
Des mois que nous attendons que ça bouge ! Enfin, l’ordre est arrivé, on passe à l’action. En éclaireur sur ma moto je pars en tête de deux automitrailleuses Panhard. Nous rentrons au Luxembourg. Dans les villages que je traverse, il n’y a pas âme qui vive. Les civils se terrent et pas un Allemand en vue. Dans la Grand-rue sans vie de Tétange, tout à coup j’entends des claquements d’obus derrière moi. Je lance un coup d’œil par-dessus mon épaule : les deux Panhard sont en flammes. Une embuscade ! Les Allemands m’ont laissé passer pour avoir les blindés, et maintenant c’est à mon tour. Un tête-à-queue et à toute vitesse vers l’arrière. Les balles sifflent autour de moi. Je ne me suis jamais fait aussi petit sur ma moto".
Mathieu Cabioch - Roscoff - Estafette motocycliste au 31° GRDI (10 mai 1940)